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Après ce survol synthétique sur les principaux
philosophes de la Troisième période, nous pouvons les énumérer un à un, en
commençant par les six écrivains qui, ensemble, forment une première vague
naturaliste. A des degrés divers, ils mettent entre parenthèses ou ils rejettent
la Révélation évangélique surnaturelle.
La question que nous leur poserons en
les étudiant est la suivante : proposent-ils une éthique meilleure que
l'éthique chrétienne ?
Le premier, Descartes, propose un bonheur d'intellectuel (de même que Spinoza). Hobbes prétend que l'homme est un loup, Leibniz supprime le scandale du mal.
Tous oublient l'un ou l'autre aspect de l'homme réel.
I. DESCARTES
(1596-1650)
Puisque la question centrale est d'après nous, celle du choix du bonheur : Que
dois-je faire ? Que vais-je choisir pour devenir vraiment
heureux ? il faut remarquer tout de suite que Descartes (que l'on nous
présente comme le "premier" philosophe auprès duquel les siècles précédents ne
valent rien) ne propose qu'une morale "provisoire". Et encore ! Est-ce une
morale ? Une personne humaine en principe ne suit pas les autres mais choisit.
Or la morale que ce grand homme nous propose est "d'obéir aux lois et aux
coutumes de mon pays" et "d'adopter la religion de ma nourrice et mon roi".
Cependant nous ne pouvons réduire Descartes à cette soumission plus ou
moins sincère au point de vue moral. Il y a aussi l'épistémologie et le fameux
doute qu'il faut situer chronologiquement.
PARTIR DE ZÉRO
Ayant tout d'abord choisi le métier des armes, Descartes a soudain le 10
novembre 1619, la conviction que chacun peut avoir une confiance illimitée en sa
propre intelligence à condition de suivre une nouvelle méthode.
Après avoir pris beaucoup de contact, il recherche la solitude, le plus souvent
en Hollande, où il passe vingt ans de sa vie. En 1637, il publie le célèbre
"Discours de la Méthode". D'une liaison avec une certaine Hélène, il a une fille
: Francine qui meurt en 1640 à l'âge de cinq ans. Il affirma que "cette mort
(lui) avait laissé le plus grand regret qu'il eût jamais senti dans sa vie".
Dans une lettre, nous découvrons la conclusion de cette liaison. Il y regrette
"ce dangereux engagement dont Dieu l'a retiré en le préservant depuis de la
récidive". Ceux qui se veulent "cartésiens" sont-ils d'accord sur ce point et
vont-ils, comme leur Maître, se contenter de la médiation rationaliste de la
majesté divine (3ème_méditation) ? Alors que sa correspondance nous montre qu'il
est très soucieux de sa santé, Descartes commet une imprudence ! Espérant
convaincre la reine de Suède, il accepte son invitation et le climat froid de ce
pays provoque une pneumonie. Descartes meut le 11 février 1650. Après ces
quelques notes biographiques, en quelques mots voici sa philosophie.
1° ÉPISTÉMOLOGIE
CARTÉSIENNE
Sa "méthode" peut permettre à chacun de "trouver en lui-même et sans rien
emprunter à autrui toute la science qui lui est nécessaire".
Le doute méthodique
Comme les sportifs s'imposent des privations et le moine une ascèse, le
philosophe doit s'imposer une règle : douter de tout y compris de l'existence de
la page
sur laquelle le lecteur lit cette recommandation y compris de l'existence de
lui-même !!!
L'évidence
Ne garder que ce qui est évident.
Trois autres règles
sont recommandées : l'analyse, la déduction et les dénombrements entiers.
2° ONTOLOGIE CARTÉSIENNE
"Est-ce qu'il existe quelque chose ?" Telle est la nouvelle forme de la deuxième
question. La réponse de Descartes est célèbre : "Je pense donc je suis"
Car je ne pourrais pas penser si je n'existait pas. Et immédiatement Descartes
remarque que j'ai des limites et j'ai besoin d'autre chose que moi.
Conclusion de Descartes : Dieu existe car l'homme doit avoir une
cause. Jusque là on peut le suivre mais dès le troisième pas, la promesse
de tout prouver n'est plus tenue : il nous demande de CROIRE (?) à des "idées
innées" déposées dans notre esprit par Dieu ???
3° ÉTHIQUE CARTÉSIENNE
J'ai déjà dit le peu d'estime que je porte à l'éthique conformiste du grand
philosophe : "obéir aux coutumes et aux lois de mon pays" et croire à "la
religion de mon roi et ma nourrice". Plus sérieuse peut-être est la conclusion
de la Troisième "Méditation" :
"La méditation "(purement philosophique?) de la majesté divine fait jouir du
plus grand contentement que nous soyons capables de ressentir en cette vie !"
Descartes a-t-il beaucoup de disciples sur ce point ??
5° ESCHATOLOGIE
CARTÉSIENNE
Si la valeur d'un philosophe peut se mesurer à sa réflexion concernant la mort,
on appréciera la réponse qu'il fait à un de ses correspondants qui l'invite à y
penser : "Et pour la mort dont vous m'avertissez, je me sens les dents si bonnes
et si fortes que je ne pense pas devoir la craindre avant trente ans". Nous
étions en 1642. Il est mort en 1650.
Cette une réponse à ceux à qui la question de la mort s'impose : "allez voir
votre dentiste". Si vos dents sont en bon état, pas de problème. Pour le cas où
cette solution ne vous paraît pas satisfaisante, Descartes ajoute "il suffit de
considérer la nature de nos âmes que je pense connaître si clairement devoir
durer plus que nos corps".
D'autres pensent que nous ne connaissons ni ce qu'est notre corps et encore
moins ce que d'autres appellent l'âme.
Avant de quitter le "fondateur de la philosophie moderne", il ne faudrait pas
oublier de signaler qu'il était très compétent en mathématique.
Le chapitre suivant présente également un génie de mathématique, Pascal
mais dans les "Pensées", il nous donne son appréciation sur Descartes. Pascal
écrit brièvement : "Descartes inutile et incertain". (L888 B52)
II. FRANÇOIS
BACON (1561-1626)
Antérieur à Descartes, mais que j'ai placé après lui par respect pour le
"fondateur de la philosophie moderne", juriste anglais qui cherche les honneurs
et la richesse en flattant le roi, en trahissant ses amis et en détournant de
l'argent. Il est condamné à la prison. Un an avant sa mort, il tire une
conclusion moralisante : "La prospérité est la bénédiction de l'Ancien
Testament, l'adversité celle du Nouveau"...
Les historiens de la Science lui donne une grande importance car il nous a
appris que "l'on ne commande à la nature qu'en lui obéissant, en la connaissant
par la torture de l'EXPERIMENTATION qui corrige l'imperfection de nos sens et de
nos préjugés".
A noter cependant que lui-même refuse les expériences de Galilée et de Harwey.
Ce philosophe ne nous apporte rien dans notre recherche du vrai bonheur.
III. THOMAS HOBBES (1588-1679)
(l'idéologie du totalitarisme)
Lui aussi est né avant Descartes mais il est mort longtemps après lui. Il est
célèbre en philosophie politique. En quelques lignes, voici ses positions :
1° La connaissance n'est qu'un mécanisme des sens.
Ce sensualisme sera fréquent chez les anglais dont nous avons omis les noms car
ils n'apportent rien de neuf en éthique.
3° Éthique utilitaire : l'homme cherche son
plaisir. L'éthique de Hobbes se situe dans les éthiques de bonheur, et est donc
plus valable que l'angélisme cartésien.
Mais en abaissant l'homme, Hobbes méconnaît l'homme total comme le montrera
Pascal :"S'il s'abaisse, je l'élève, s'il s'élève je l'abaisse jusqu'à ce qu'il
découvre qu'il est incompréhensible" (en dehors de la révélation évangélique).
4° Politique réaliste
"L'homme est un loup pour l'homme". Cette constatation est également valable :
l'État est nécessaire pour limiter le carnage. Mais la forme de l'État qu'il
préconise n'est plus acceptée : le pouvoir absolu du roi.
IV.
SPINOZA (1632-1677)
(l'intellectualisme systématique)
Descendant de juifs portugais, ce philosophe hollandais a été excommunié de la
synagogue. Gagnant sa vie en polissant des verres de lunettes, il consacre le
plus possible de temps à son système philosophique et il prétend nous donner une
"morale démontrée avec la méthode géométrique".
On y retrouve de l'hindouisme (ou si l'on préfère Parménide
PP3) et aussi du
stoïcisme (PP7_2). Certains intellectuels admirent cette morale théoriquement. Notre
esprit fait, d'après SPINOZA, partie de l'intelligence de Dieu qui est "tout".
Tout arrive d'une manière déterminée et nécessaire. Tout est déterminé et nous
ne sommes pas libres. Mais nous le sommes quand même assez pour accepter de ne
pas l'être.
Concrètement Spinoza d'après certains documents était assez intéressé à l'argent
pour aller jusqu'à mettre en prison un débiteur...
Les spécialistes nous assurent qu'il est un génie de la logique. Quand à la
morale, faut-il suivre celle de ses livres ou celle de sa vie ?
V. MALEBRANCHE
(1638-1715)
Prêtre de l'oratoire, il a des palpitations au coeur en découvrant DESCARTES et
à son tour écrit de gros livres "pour mettre autant que cela se peut la raison
dans le parti de la religion". Il essaie de justifier rationnellement la
foi chrétienne. Non seulement je serai chrétien mais je serai philosophe.
Il semble faire le chemin inverse d'Augustin. Progressivement, Augustin s'en
réfère aux Écritures "tout ce que vous apprenez là, savourez-le, tout ce qui est
en dehors, rejetez-le".
Progressivement, Malebranche essaie de réduire la foi à la philosophie. Il
invente une théorie curieuse : "l'occasionnalisme" qui veut laisser toute la
causalité à Dieu.
VI. LEIBNIZ
(1646-1716)
Grand mathématicien, marqué par la guerre de trente
ans qui de 1618 à 1648 a dévasté l'Europe, il rêve d'établir un christianisme
qui pourra être universel en étant naturel et non surnaturel. Ceux qui veulent
l'étudier pourront lire les 20.000 lettre qu'il a écrites à 600 correspondants.
Retenons de lui la leçon suivante : il faut admettre qu'il y a une raison au
monde sinon il faut abdiquer la raison. Mais Leibniz a tellement confiance dans
cette raison qu'il refuse d'admettre qu'il y ait un mal irrationnel ou
scandaleux. Tout est "en harmonie préétablie, sympathie, accord,
complémentarité, covariance, préadaptation, symphonie comme celle ces mille
bruits qui composent le mugissement de la mer". Son christianisme
"philosophique" a-t-il encore de nos jours un seul disciple vivant ? Ou bien
s'agit-il d'un système de pensée intéressant les seuls historiens ?
VII. LA VRAIE
PHILOSOPHIE AILLEURS...
Il est inutile de le cacher, ces six philosophes, non seulement m'ont
laissé indifférents mais je regrette infiniment le temps que j'ai consacré à les
étudier, car dans notre "recherche du bonheur", ils ne m'ont rien apporté.
Si j'ai un conseil à donner à ceux qui s'intéressent à la philosophie telle que
nous l'avons comprise c'est à dire comme le choix du vrai bonheur, qu'il se
tournent plutôt vers ce qu'on appelle la LITTÉRATURE de cette époque.
Dans plusieurs "fables" de LA FONTAINE (1621-1695), dans les "Maximes" de LA
ROCHEFOUCAULD (1613-1680), dans les pièces de théâtres de CORNEILLE (1606-1684),
MOLIÈRE (1622-1673) et RACINE (1639-1689), ils apprendront plus de choses sur la
recherche du bonheur que dans les livres des auteurs mentionnés plus haut.
Mais plus perspicace qu'eux tous, il y a le plus grand philosophe des temps
modernes : PASCAL, auquel est consacré le chapitre suivant.
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