Au delà de la mort y a t-il quelque chose ? Et quoi ?
L'Histoire, le temps ont-ils un sens ?
(question décisive)
Nous en arrivons à la question humaine que j'ai placée en
dernière position alors qu'elle est la plus importante, alors qu'elle est
décisive et que les réponses des autres questions sont bouleversées selon la
réponse qui lui est apportée : "Y a t-il quelque chose après la mort ?
Cette question, la plupart des hommes font tout et n'importe quoi pour l'éviter.
Comme elle est la plus difficile, elle est la moins discutée. Cette question,
beaucoup d'hommes ne la posent pas mais elle s'impose à eux à l'occasion d'abord
de la mort d'une autre personne humaine, surtout lorsqu'il s'agit d'un ami ou
d'un parent. La question va se poser un jour d'une manière nouvelle pour
moi et pour le lecteur. Mais ni lui, ni moi nous ne pouvons le comprendre
maintenant.
Un petit récit très célèbre du romancier russe TOLSTOÏ,
intitulé "LA MORT d'IVAN ILLITCH" peut nous faire pressentir un peu ce que je ne
ressentirai vraiment que ce jour-là.
"Lorsque dans le regard des autres, je verrai que, d'après eux, pour moi
c'est fini, qu'il ne me reste plus que quelques jours ou quelques heures,
j'accéderai à une lucidité nouvelle, inaccessible auparavant. Il ne s'agira plus
du phénomène biologique de la mort, ni de la question philosophique de la mort
en général, ni même de la mort d'un ami, de ma maman, c'est moi-même qui
entrerai dans une solitude absolue car personne autour de moi ne vivra à ce
moment là dans cette expérience mystérieuse de l'agonie.
Un nouveau point de vue va s'imposer sur mon passé, sur ce qui semblera
important encore aux autres et qui ne le sera plus pour moi à ce moment-là..."
Ce récit de Tolstoï qui fait un peu comprendre ces évolutions
psychologiques, philosophiques et religieuses de l'agonie est peut-être un des
meilleurs textes pour "entrer en philosophie", même s'il se termine d'une
manière ironique... D'autres auteurs comme PASCAL, KIERKEGAARD ou tout
simplement les quatre Évangiles pourraient nous réveiller du "divertissement"
ininterrompu dans lequel sont noyés la majorité des êtres humains. En tout cas,
mieux vaut se réveiller le plus tôt possible pour comprendre que cette
dernière question est la question décisive.
Car la question centrale de la philosophie : "Que vais-je choisir pour devenir
vraiment heureux ?" recevra une toute autre réponse selon que je pense que la
mort est un point final, un commencement ou un passage.
Le lecteur qui comprend que cette question est décisive pourra apprécier
l'importance des textes de l'Histoire de la Pensée selon le nombre de pages qui
y sont consacrées à la mort. MARX y a consacré deux lignes ! SOCRATE en parle
tout au long de son Apologie et jusqu'au moment de sa mort.
AUGUSTIN nous rapporte ses réactions devant la mort d'un ami avant sa propre
conversion et ses réactions devant la mort de sa mère, après qu'il ait été
converti par Dieu à l'espérance. PASCAL s 'appuie sur cette question de
l'au-delà de la mort et sur d'autres aspects incompréhensibles de la "condition
humaine" pour disqualifier toutes les sagesses purement naturelles et montrer
que chacun de nous est contraint de faire un choix qui dépasse la raison. Il est
raisonnable de croire, Il n'est pas possible de s'enfermer dans une pure
philosophie rationaliste, une pure sagesse naturaliste. PASCAL DISQUALIFIE LE
NATURALISME.
RÉPONSES
Toutes les réponses à la question sur l'au-delà de la mort ont en commun,
d'être des croyances, comme l'a constaté le philosophe contemporain
LEVINAS : "On ne sait pas, on croit".
1/ Certains disent qu'il n'y a rien après la mort. Ils ne le savent pas, ils le
"CROIENT". Ont-il réussi à supprimer en eux-mêmes la soif d'un bonheur sans
fin ? cette soif que l'on trouve chez les hommes les plus anciens comme le
prouvent les tombes, n'est-elle que désir pathologique ?
2/ D'autres "CROIENT" que l'âme se réincarne dans un autre corps plus ou moins
élevé en dignité selon le bien et le mal commis dans la vie précédente.
3/ D'autres "CROIENT" que le défunt pour lequel les rites prescrits ont été
accomplis accède à la dignité d'ancêtre.
4/ D'autres "CROIENT" que l'âme est libérée de la prison du corps.
5/ Puis les juifs, les musulmans et les chrétiens "CROIENT" en la résurrection.
Le mot croyance suffit pour comprendre que nous avons quitté le domaine de la
réflexion philosophique purement rationnelle pour entrer dans le domaine des
CROYANCES religieuses. Et nous voyons ainsi que tout homme, s'il veut affronter
une réflexion sérieuse concernant sa propre mort doit dépasser les limites des
philosophies et entrer dans celui des CROYANCES. Voilà pourquoi cette histoire
de la Pensée a reçu comme sous-titre : CROYANCES, PHILOSOPHIES, THÉOLOGIES.
LE TEMPS, LE "SENS" DE L'HISTOIRE
la cinquième partie de la philosophie ne concerne pas seulement l'au-delà de la
mort pour chaque personne individuelle mais aussi la question du sens du temps,
la philosophie de l'histoire. Mais cette idée du "sens de l'histoire" était
inconnue des philosophes qui n'avaient pas encore été en contact avec le
judéo-christianisme. Ils étaient tous persuadés qu'il n'y avait "rien de nouveau
sous le soleil" mais "un retour cyclique" des choses anciennes sans véritable
progrès.
La perfection était dans l'immortalité des astres. Le temps était cyclique et
non pas linéaire, le mouvement était perçu comme un mal.
- Cette idée d'un temps compris comme
une ligne qui progresse vers une nouveauté vient du peuple juifs avec l'idée de
la venue d'un "Messie" qui est encore attendu avec ferveur par les juifs
fervents que nous pouvons rencontrer.
- Avec la foi chrétienne, l'attente
devient celle du Retour du Messie, Jésus.
- Puis, comme nous le verrons, ce
messianisme va se séculariser.
- Après l'utopie marxiste, on en
reviendra au désespoir antique.
***
INCONVÉNIENTS ET AVANTAGES DU DÉCOUPAGE EN
CINQ QUESTIONS
Au moment de conclure cette première partie de l'exposé préalable dans laquelle
j'ai distingué CINQ GRANDES QUESTIONS EN PHILOSOPHIE que l'on retrouve pour
chaque croyance, chaque philosophie et chaque théologie, je dois signaler les
inconvénients de ce découpage.
Certaines philosophies et certaines croyances négligent telle ou telle question,
l'ignorent ou la posent autrement. La foi chrétienne par exemple n'est pas
un système de réponses à nos questions car elle n'est pas une pensée, elle est
centrée autour d'une personne, Jésus (voir
PCchap1)
Mais je reste persuadé que les avantages de cette structure en cinq questions
l'emportent sur les inconvénients car elle permet une première découverte
et facilite la mémorisation. Je veillerai à remédier aux inconvénients en
signalant que tel auteur ne répond qu'à telle question ou que tel autre centre
sa pensée autour d'une autre.
suite
Exposé Préalable