PP
chap. 7
-1-

 
L'ÉPICURISME 
désenchanté et calculateur
 

 

 

Sommaire

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 


 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

sommaire

 

Tout d'abord trois noms :

ARISTIPPE le Cyrénaïque (-435-350) est un disciple de Socrate : il déforme le "Connais-toi toi-même" en "ne t'occupes que de ton petit plaisir".
ÉPICURE (-341-270) ouvre en 310 une école de philosophie à Athènes près d'un JARDIN d'où l'appellation de "Philosophie du Jardin" pour désigner l'épicurisme.
LUCRÈCE (-91-51) est un poète latin qui traduit la philosophie d'Épicure dans un poème : "De natura Rerum" dont le titre "la nature des choses" est devenu une expression en français pour  suggérer le réalisme et le renoncement à un bonheur parfait.
(On peut signaler qu'à l'époque de Descartes, certains philosophes comme GASSENDI (1592-1655) vont se considérer comme des disciples d'Épicure, que Marx consacrera sa thèse à "la différence de la philosophie de la nature chez Démocrite et Épicure", et que plusieurs philosophes actuels sont épicuriens.)
Après les noms importants de cette tradition, les réponses à nos cinq questions.

1°ÉPISTÉMOLOGIE ÉPICURIENNE
Appelée canonique (du mot grec canon qui signifie règle), l'épistémologie épicurienne donne comme règle de s'en tenir aux sens, à la connaissance sensible, à ma sensation.

2° ONTOLOGIE ÉPICURIENNE
Plutôt que de s'occuper de "ce qui existe vraiment" l'ontologie épicurienne vent nous aider à enlever les craintes imaginaires et surtout celle de la mort. "Aussi longtemps que je vis, la mort n'existe pas pour moi". Cessons de même d'inventer une durée éternelle en regrettant de ne pas être immortel. Personne ne se plaint de ne pas avoir existé durant l'éternité qui a précédé sa vie. De même, cessons de rêver à une survie. Comme on le voit. L'épicurisme commence par nous engager à RENONCER AU BONHEUR ABSOLU.
Autre crainte qu'il faut chasser : celle des dieux. Sans doute existent-ils, mais ils ne s'occupent pas de nous.

3° ÉTHIQUE ÉPICURIENNE
Comme beaucoup de philosophies que nous avons présentées, l'épicurisme modifie la question. Non pas "Que vais-je choisir pour devenir VRAIMENT heureux," mais "pour devenir RÉELLEMENT heureux?"
En renonçant au "vrai" bonheur, en se contentant de l'ABSENCE DE TROUBLE "l'ataraxie" semble proche du "Nirvana" bouddhiste.
                Le bouddhisme voulait éteindre tout désir.
                L'épicurisme propose une théorie véridique des désirs en rejetant les désirs artificiels et en distinguant les désirs naturels et nécessaires  : la santé du corps et l'atarxie (l'absence de trouble)  de l'âme en évitant la souffrance du corps et le trouble de l'âme.
Il ne faut donc pas accepter le premier plaisir venu.
"Nous méprisons de nombreux plaisirs quand ils ont pour conséquence une peine plus grande. D'autre part, il y a de nombreuses souffrances que nous espérons préférables aux plaisirs, quand elles préparent pour nous un plus grand plaisir".
C'est par une sage considération de l'avantage et du désagrément qu'il procure, que CHAQUE PLAISIR DOIT ÊTRE APPRECIÉ.
Ce qui procure une vie heureuse CE N'EST PAS LA DÉBAUCHE, MAIS DES HABITUDES RAISONNABLES ET SOBRES. Il faut donc résister aux opinions qui (en fait) apporteront à l'âme le plus grand trouble. On ne cherche pas la vérité, on évite le trouble !!! La plus grande vertu est la PRUDENCE, elle est supérieure à la philosophie elle-même !

4° PAS DE POLITIQUE ÉPICURIENNE
Se soucier de l'organisation de la société ne peut apporter que du trouble. Il faut se contenter d'un petit groupe d'amis "Vivons heureux, vivons cachés". Gardons le souvenir des entretiens agréables que nous avons eu ensemble.

5° PAS D'ESCHATOLOGIE ÉPICURIENNE
Encore moins d'eschatologie que de politique. Le seul bonheur réel est de ne plus rien espérer.
Comme le bouddhisme, dont il modifie seulement quelques conclusions, l'épicurisme peut être présenté en deux ou trois pages faciles mais son influence réelle est bien plus grande que les spéculations des philosophes modernes qui demandent plusieurs pages incompréhensibles.
Seule la révélation évangélique d'un bonheur infini et éternel: la tendresse méconnue de Dieu envers chaque personne humaine, peut raisonnablement être opposée à la prudence épicurienne.
A ceux qui ne donnent plus leur foi à Jésus, il ne leur reste plus que la conclusion de Paul : Si le Christ n'est pas ressuscité "mangeons et buvons, car demain nous mourrons" (1Cor. 15/32).
Pour ceux qui veulent connaître une forme actuelle de l'épicurisme ils peuvent lire les oeuvres de André COMTE SPONVILLE : "Une éducation philosophique" 1989.

(suite PP chap. 7-2)